- PRÉFET (France)
- PRÉFET (France)PRÉFET, FranceInstitué en l’an VIII, le préfet succède à l’intendant de l’Ancien Régime. Véritable délégué du pouvoir central dans chaque département, principal agent de la centralisation, le préfet napoléonien est conçu comme essentiellement chargé de l’exécution des décisions ministérielles. Selon la formule de Chaptal, rapporteur de la loi du 28 pluviôse an VIII, le préfet est chargé de transmettre «la loi et les ordres du gouvernement jusqu’aux dernières ramifications de l’ordre social avec la rapidité du fluide électrique».Avec la loi du 10 août 1871, qui consacre une lente évolution, le département, doté de la personnalité morale, devient une véritable collectivité locale, et le préfet se voit doté de pouvoirs et d’attributions très étendues, en qualité d’organe exécutif de cette collectivité territoriale. Le préfet est à la fois le représentant de l’État dans le département, circonscription administrative de l’État, et le représentant du département, collectivité locale. Ce dédoublement fonctionnel a caractérisé l’institution préfectorale jusqu’à la loi du 2 mars 1982 sur les libertés des communes, des départements et des régions, qui a retiré au préfet la fonction d’exécutif départemental pour l’attribuer au président du conseil général.Cependant, les mesures destinées à développer une véritable décentralisation dans notre pays n’ont pas fait disparaître l’institution préfectorale comme certains l’auraient souhaité.Aujourd’hui, le préfet exerce une triple compétence: il assure la représentation de l’État, il dirige les services de l’État dans le cadre départemental, il est chargé du contrôle des collectivités territoriales.La mission de représentation de l’État dont est investi le préfet est affirmée clairement par la loi du 2 mars 1982, qui précise que le représentant de l’État «représente chacun des ministres», qu’il «est seul habilité à s’exprimer au nom de l’État devant le conseil général» et qu’il a «la charge des intérêts nationaux, du respect des lois, de l’ordre public». Le préfet assure, en premier lieu, la fonction de représentation juridique de l’État. C’est lui qui représente l’État auprès des personnes morales bénéficiaires de concours financiers de l’État et dont l’action ne dépasse pas le cadre départemental. De même, le préfet a seul compétence pour négocier et signer au nom de l’État toute convention avec le département, les communes et leurs établissements publics. Il est également compétent pour représenter l’État en justice. Sa qualité de «dépositaire de l’autorité de l’État» implique qu’il ait «en toute circonstance [...] la prééminence dans les cérémonies publiques sauf lorsqu’un membre du gouvernement est personnellement présent». Sa mission de représentation de l’État implique qu’il détienne des pouvoirs importants en matière de réglementation et de sécurité générale. La loi de 1982 réaffirme que le représentant de l’État a la charge des intérêts nationaux, du respect des lois, de l’ordre public. Il est seul compétent pour prendre des mesures relatives au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d’application excède le territoire d’une commune.Le préfet est également investi de pouvoirs de police judiciaire. Prévues à l’origine par l’article 10 du Code d’instruction criminelle, dont le texte, très discuté en raison des pouvoirs qu’il conférait à une autorité administrative subordonnée au gouvernement, a été supprimé par la loi du 7 février 1933 sur la liberté individuelle, puis rétabli par la loi du 25 mars 1935 avec une rédaction précisant des limites et des garanties, enfin repris par l’article 30 du nouveau Code de 1957, lui-même modifié par l’ordonnance du 13 février 1960 et le décret du 20 juillet 1971. Ces mesures lui permettent, en matière de crimes et délits contre la sûreté de l’État et seulement s’il y a urgence, de faire «personnellement» ou requérir les officiers de police judiciaire de faire «tous actes nécessaires à l’effet de constater les crimes et délits ci-dessus spécifiés». Il doit aviser immédiatement le procureur de la République et lui transmettre le dossier en respectant un délai de quarante-huit heures maximum, à peine de nullité de la procédure.Chargé de la direction des services extérieurs de l’État dans le département, le préfet a seul qualité pour recevoir des délégations des ministres. Il a autorité directe sur les chefs de service des divers ministères. Unique ordonnateur secondaire, il assure la gestion du patrimoine, du mobilier et des matériels de l’État. Si, à l’égard des fonctionnaires de l’État en service dans le département, il ne dispose pas du pouvoir de notation, il est doté du pouvoir de proposition de notation sur les chefs de service départementaux, et il doit être consulté préalablement à toute nomination ou mutation les concernant. Destinataire de toutes les instructions, circulaires, notes de service émanent des administrations centrales, il est tenu informé de toutes les affaires qui peuvent avoir une importance particulière dans le département.Enfin, le préfet exerce un important pouvoir de contrôle sur les autorités décentralisées. La loi du 2 mars 1982 a sensiblement allégé l’emprise de l’État à l’égard des collectivités locales ainsi qu’en témoigne la substitution du mot «contrôle» à celui de «tutelle», mais le préfet reste investi d’un certain nombre de prérogatives destinées à assurer le respect de la légalité par les collectivités locales. En premier lieu, s’il n’y a plus d’approbation préalable des actes des autorités locales, ceux-ci ne sont exécutoires de plein droit qu’après avoir été transmis au représentant de l’État ou à son délégué. Le contrôle de ces actes est un contrôle juridictionnel a posteriori puisque, dans les deux mois suivant la transmission d’un acte, le préfet peut, s’il l’estime illégal, le déférer au tribunal administratif aux fins d’annulation. En outre, en matière budgétaire, il exerce, dans une certaine mesure et dans des hypothèses bien précises (budget non voté avant le 31 mars, budget présenté en déséquilibre, déficit dans l’exécution du budget antérieur, refus d’inscription d’une dépense obligatoire), un véritable pouvoir de substitution assorti certes de garanties, dont la plus importante est l’intervention de la chambre régionale des comptes, mais qui n’en demeure pas moins très fort.Il convient de relever que, comme par le passé, les préfets assurent une fonction d’assistance et de conseil à l’égard notamment des petites communes. Il est certain que le rôle des préfets évoluera par rapport à celui qu’ils jouaient avant 1982, mais on peut penser que ce ne sera pas forcément dans le sens d’un amoindrissement de leur influence, l’histoire du corps préfectoral, qui a su traverser des régimes politiques différents sans disparaître, est là pour prouver que son existence répond à une nécessité de nos structures politico-administratives.
Encyclopédie Universelle. 2012.